Cet article a paru dans le numéro d'avril 2020

Par Guillaume Boulesteix



Après l’identification d’une maladie virale, dont le virus en cause est désigné par le terme COVID-19, dans la pro-vince chinoise de Wuhan en janvier 2020, les Gouvernements de nombreux Etats - dont la France - ont édicté des mesures de confinement de la population et de restrictions d’activités à partir du mois de mars, et ceci, pour plusieurs mois. Ces mesures visent à ralentir la propagation du virus, étaler dans le temps la prise en charge des malades dans les hôpitaux, et optimiser la gestion du matériel de protection et de réanimation. Au vu des multiples répercussions à envisager, cette crise sera-t-elle l’occasion de nous (ré)interroger sur notre mode de vie et sur notre rapport individuel et collectif à la spiritualité ?

Besoins essentiels
La crise sanitaire mondiale a pour conséquence de restreindre l’accès aux biens et aux services en bloquant leurs circuits de production. Mais ceci signifie aussi moins de ressources ponctionnées sur la Terre, moins de déplacements effectués, moins de pollution émise. La planète souffle. Pourrons-nous transformer cette frustration de moins pouvoir consommer en un questionnement sur ce dont nous avons réellement besoin ? Si j’ai pu me passer d’une chose ou d’un service non essentiel pendant plusieurs mois, vais-je l’acheter lorsqu’il redeviendra accessible ?

Choix, Obligations, Dilemme
Beaucoup d’entre nous ont l’obligation de sortir pour aller travailler, qu’ils soient dans l’impossibilité de travailler à distance, réquisitionnés ou réaffectés à des missions prioritaires. Mais si je fais partie de ceux qui ne sont pas obligés de sortir et que j’entends un appel d’une collectivité, d’une association caritative ou d’un ami en détresse : que vais-je décider face au risque de contamination ? Aider ou rester chez moi ? 

Conscience, Culte et
Communauté
■ Imposé pour limiter la contagion, le confinement nous interdit de nous réunir physiquement. Cette contrainte nous a incité à organiser des réunions de recueillement par le biais d’Internet afin de maintenir un culte. La plupart des membres vivant en France n’ont l’occasion de se rencontrer qu’une fois par an, et encore, à condition de pouvoir se déplacer. Certains d’entre nous ne s’étaient jamais encore vus. La force d’une communauté n’est-elle pas d’avoir conscience de la profondeur d’une telle communion, du sens de ce moment partagé malgré la distance et les nouvelles modalités de mise en relation ?
■ La numérisation des moyens de communication nous permet désormais d’organiser des activités spiri-tuelles « à distance » qui soulèvent des questions inédites. Qu’est-ce qui définit un culte ? Quelles sont les conditions élémentaires requises pour le faire exister ? Qu’est-ce qui en constitue l’Essence ?
■ Ces réunions hebdomadaires ont permis d’inclure des membres et sympathisants géographiquement éloignés qui, d’ordinaire, ne peuvent pas participer aux Assemblées. Maintiendrons-nous un culte partagé à distance, de manière occasionnelle ou régulière, afin de maintenir un tel lien entre nous et, en particulier, avec ceux qui sont isolés ?

Esprit
Un tel confinement peut renforcer la conscience qu’une communauté a d’elle-même, et le lien qui unit ses membres, peu importe le lieu où ils vivent ce confinement. Le propre de l’Esprit n’est-il pas d’unir des Êtres dans l’espace et le temps ? 

Lumière
■ La crise sanitaire, et le confinement qu’elle impose, mettent en lumière ceux qui sont d’ordinaire dans l’ombre, qu’ils soient vulnérables comme les personnes souffrant de maladies chroniques, dépendantes tels les handicapés et les personnes âgées, ou en situation de grande précarité comme les sans-abris. Pourquoi certains d’entre eux sont-ils restés invisibles à nos yeux ?
■ La Lumière brille pour la première fois sur des professionnels qui assurent la satisfaction de nos besoins collectifs vitaux, tels les aides-soignants, les agriculteurs, les agents d’entretien, les éboueurs, les caissiers, les livreurs, les logisticiens… Va-t-on réaliser que l’utilité sociale d’une profession n’est pas liée au statut, au diplôme ou à la rémunération ?
■ Cette crise est l’occasion de tenir dans la Lumière nos proches, mais aussi certaines personnes à qui nous n’aurions jamais songé. La crise bouleverse la perception que nous avons des autres. En quoi nos rapports aux autres seront-ils différents une fois la crise passée ?

Silence
Le confinement et les restrictions de déplacement produisent en ville un silence inédit et propice à la contemplation. Mais que la ville soit calme ou bruyante, déserte ou saturée, saine ou polluée, ne savons-nous pas faire abstraction de tout afin de faire naître le Silence en nous et être attentifs aux manifestions du Divin ?

Spiritualité
La spiritualité dans la crise n’est pas une crise de la spiritualité. Saurons-nous enrichir notre expérience individuelle et collective ?

Guillaume Boulesteix est sympathisant du groupe de Toulouse.